Faut-il surfer la formation ?
Joël de Rosnay vient d’écrire un ouvrage sur le fait de surfer comme un nouveau modèle de développement, il parle même de révolution industrielle. Un changement qui va nous faire repenser l’ensemble de nos secteurs d’activité. Comment imaginer que la formation ne soit pas impactée par cette révolution ? Comment doit-on imaginer le fait de surfer la formation ? L’avenir est-il dans le surf ?
Le terme de surfer recouvre 3 types de conceptions. Le premier est celui de survoler : en formation, on surfe sur la vague sans jamais entrer dans les profondeurs de la connaissance. C’est d’ailleurs dans ce sens de survol, que le terme a été créé avec le succès que l’on connait par ne bibliothécaire américaine. Surfer, surfer, mais que restera-t-il une fois que la vague se sera échouée ? On sent bien toute la critique qui vient derrière. Mais le terme a pris une autre dimension beaucoup plus valorisante avec le net où le surf est une façon de naviguer de vagues en vagues pour trouver ce que l’on cherche, parfois ce que l’on ne cherche pas. Une nouvelle façon de ranger ses connaissances, le surf devient le bastion pour lutter contre l’infobésité. Enfin, le surf recouvre une notion de plaisir avec l’esprit des communautés hippies dans un rapport cosmologique à la nature, une iconographie des temps modernes.
Le surf est une révolution industrielle c’est l’introduction de la société liquide vs la société rigide. Cette nouvelle société en émergence repose sur 3 piliers : l’open source, source de gratuité, les doueurs, makers de la connaissance, hackers du savoir, et la communauté. En un mot le surf repose sur la déverticalisation des structures, le P2P. Qu’est-ce que cela change pour la formation ? Il s’agit de déverticaliser le savoir de l’entreprise, les apprenants reprennent le pouvoir et deviennent les doueurs du savoir. Concrètement quelle forme cela peut-il prendre ? L’ingénierie pédagogique a lieu d’être trop souvent l’ingénierie des sachant sans faire deviendrait l’ingénierie des doueurs sans savoir, qui individuellement sont de peu mais qui ensemble construisent une intelligence collective
L’entreprise qui est un lieu de pouvoir dans cet univers prôné par Joël de Rosnay, devient, si l’on suit l’auteur, un monde magique et fantasmagorique autour du surf ou, si l’on enrichit sa démarche, un nouveau rapport social. L’entreprise après avoir été un capital économique (Marx), un capital culturel et social (Bourdieu), devient un capital de la visibilité selon Nathalie Heinich (De la visibilité Gallimard, 2012). La rareté n’est plus de mise dans le monde de l’information surabondante mais la visibilité de cette information. Le travail d’organisation des entreprises, et particulièrement de la formation, devient de mettre en spectacle le sens pour le rendre visible. Tout le travail de la formation est de mettre en spectacle l’apprentissage autour de points de cristallisation, les hot spots, pour que les communautés de surfeurs aient envie de s’agréger et de contribuer aux sujets stratégiques de l’entreprise. Motiver, créer du plaisir, érotiser la formation, sublimer les contenus deviendra le cœur du métier de responsable de formation avec cette légèreté qui fera de lui un artiste sachant surfer sur toutes les vagues de la connaissance sans jamais se laisser engloutir par une seule. Mais si tel était le cas, alors la communauté sera là pour prendre soin de lui car au fond, comme le disait Joël de Rosnay, si le surf est un sport qui se pratique seul c’est toujours au sein d’une équipe.
Stéphane Diebold, Paris, le 04 juillet 2012, publié par Focus RH
Comments
No comment yet.